Nuit
et brouillard
1-
Le document
Documentaire
de 32 minutes. Réalisé par Alain Resnais, (né à Vannes le 3 juin
1922).
Croisement
entre les images en couleurs tournées en 1955 et les images
d'archives en noir et blanc, leur constante mise en perspective par
le commentaire sobre et informatif dit par Michel Bouquet, le lent
crescendo dans l'horreur des images confèrent au film une force
confondante.
⇒ les
images tournées en 1955 en couleurs, à Auschwitz ;
⇒ celles
tirées des archives nazies : beaucoup de photos fixes ;
⇒ celles
des cinéastes des armées alliées qui ont ouvert et « nettoyé »
les camps en 1945.
Alain
Resnais a eu notamment accès à certaines séquences tournées par
Sidney Bernstein, chef de la section cinéma des armées alliées à
l'ouverture du camp de Bergen-Belsen dans le but de faire le procès
des Allemands. Le projet du film avait été abandonné en 1946.
2-
Contexte des années 1950
Le
film est réalisé 10 ans après la fin de la guerre. De fait, Nuit
et Brouillard est d'abord un film sur le phénomène
concentrationnaire tel que les déportés des camps de Dachau et de
Buchenwald ont pu en rapporter l'expérience. L'auteur du
commentaire, Jean Cayrol, en était lui-même un rescapé. Le film
montre bien les chambres à gaz d'Auschwitz mais gomme la spécificité
du génocide juif. L'oeuvre d'Alain Resnais se situe dans cette
première période de la mémoire de la déportation, où le choc de
l'ouverture des camps est proche mais où l'on distingue encore mal
l'ampleur et la diversité du phénomène. « À la veille du passage
du film en commissions de censure, Resnais est prié de supprimer un
plan. [...] On lui promet, en échange, "de ne rien couper à la
dernière bobine", donc à l'ouverture du film sur le présent.
Son refus de s'autocensurer bloque le film jusqu'au jour où Resnais
consent à "mettre une poutre à la gouache sur le képi du
gendarme" tout en maintenant la référence orale à Pithiviers
dans le commentaire. [...] [Le film] mêle un certain soutien
officiel et des marchandages de dernière minute, dont la note
d'humour n'est pas exclue : le dos de la photo incriminée portait
l'autorisation de la censure allemande. » (Joseph Daniel, Guerre
et Cinéma, Armand Colin et Fondation nationale des
sciences politiques, 1972.)
3-
les deux grandes périodes de la politique concentrationnaire
allemande.
-
1933-1941 : création des principaux camps de concentration, Dachau
(1933), Buchenwald (1937), Auschwitz (1940).
-
1941-1945 : camps de concentration et d'extermination.
Dans
Mein Kampf, écrit
en 1924, Hitler avait clairement annoncé :
«
La loi la plus générale et
la plus impitoyable est la lutte des races pour leur espace vital. Un
groupe
mène
la lutte avec franchise, audace et conscience de sa supériorité
raciale. C'est le groupe des
races
des Seigneurs et des Guerriers(.) De ces races, la plus grande(.)est
la race allemande(.)Une
fraction
restreinte mais puissante de la population mondiale a choisi le
parasitisme(.) Elle cherche à
s'établir
parmi les peuples sédentaires, à priver celle-ci du fruit de leur
travail, à prendre le pouvoir.
L'espèce
la plus dangereuse de cette race est la juiverie.
30
janvier 1933, Hitler et ses partisans prennent le pouvoir en
Allemagne. Un mois plus tard Heinrich Himmler dirige la police de
Munich et dès le 20 mars, il donne une conférence de presse pour
claironner la création d'un camp de concentration dans la banlieue
de Munich, à Dachau. L'élimination systématique des adversaires
politiques est donc bien l'une des premières mesures du régime
national-socialiste. Communistes, sociaux démocrates mais aussi
monarchistes refusant le joug totalitaire vont, les premiers, en
faire les frais. Progressivement le nombre de camps de concentration
va augmenter et le public des victimes s'élargir : malades
incurables, juifs, homosexuels, tziganes, malades mentaux, témoins
de Jéhovah. Tout prétexte est mis en oeuvre pour isoler, avilir,
puis anéantir des catégories entières d'êtres humains.
Dès
1933 les nazis bannissent les juifs de la fonction publique et de la
pratique des professions libérales. En 1935 ce sont les mariages
mixtes et les rapports sexuels entre juifs et non juifs qui sont
interdit par la loi, puis à partir de 1938 tout un arsenal
législatif exclut les juifs de l'économie et de leurs biens. Mort
civique, mort sociale, mort économique, ce sont bien les conditions
d'une extermination qui sont mises en place avant même le
déclenchement de la guerre.
4-
Des camps connus de la population
Les
nazis font largement connaître la politique d'internement qu'ils
pratiquent : il s'agit pour le régime de faire pression sur toute
velléité d'opposition. Ainsi le très officiel journal Illustrieter
Beobachter portant sur sa couverture la croix gammée
publie-t-il début 1937 un reportage sur Dachau « qui
nous fait voir le sévère régime de la vie du camp et le dur
service des SS qui montent ici la garde pour le bien de la communauté
du peuple, pour le bien de la communauté de la nation ».
Sous
la photo des prisonniers que le journal appelle des « untermenschen
», c'est-à-dire des
soushommes, une légende : « trois
représentants typiques de l'humanité inférieure au camp de
concentration de Dachau. Un communiste, Un fainéant. Un criminel
professionnel. » D'autres,
crâne rasé et en tenue de forçats sont taxés de « récidivistes
politiques qui n'ont pas renoncé à leur activité d'agitateurs et à
leur travail souterrain contre le nouvel État, même après une
première détention. »
La
santé des détenus est déclarée « excellente
» par le journal qui
précise toutefois « qu'il
en est autrement de la santé héréditaire des détenus. Les tares
biologiques raciales héréditaires de certains détenus forcent à
l'occasion le médecin du camp à solliciter leur stérilisation ou
même leur émasculation, en vertu de la loi sur la descendance
tarée. »
C'est
à un tel régime que certains vont choisir de collaborer et d'autres
de résister.
5-
Le programme Nuit et Brouillard
La
politique d'extermination à grande échelle qui va suivre se fera
sur la base de ces orientations proclamées à la face du monde bien
avant la déclaration de la guerre. Face à l'accentuation du
conflit, à l'automne 1941 et aux politiques de résistance que
rencontrent les nazis, ceux-ci vont codifier et réglementer la
disparition de milliers d'adversaires politiques.
C'est
à Wagner que les nazis empruntent la terminologie de « Nuit
et Brouillard »
: dans L'Or
du Rhin,
Alberich, coiffé du casque magique se change en colonne de fumée
tandis qu'il chante « Nuit
et brouillard, je disparais ».
Pour l'extrême droite allemande au pouvoir, il ne s'agit nullement
de disparaître mais de faire disparaître sans laisser de traces.
Questionnaire
élève
I-
Étude de la forme
-
quel effet produit l'utilisation du noir et blanc ?
-
que cherche à montrer l'utilisation des gros plans ?
-
le film se divise en deux parties : donnez un titre à chacun d'elle.
II-
Connaissances factuelles et compréhension des images montrées
-
que sont Ravensbrück, Dachau et Auschwitz ?
-
qu'est ce qu'un Kapo ? un SS ?
III
censure du film et limites de ce qu'il montre
Pourquoi,
dans le passage sur le camp de Pithiviers, le gouvernement français
a-t-il fait censurer une
image
?
En
vous servant du cours, précisez quelles sont les deux grandes
périodes de la politique
concentrationnaire
allemande ?
Que
signifiait le terme "Nuit et Brouillard" dans la
terminologie nazie ?